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Guy Laporte s’est envolé au paradis de l’ovalie, il y a quelques jours de cela, laissant orphelin le Sporting Club Graulhetois, le monde du rugby français et ses proches . Dans le cadre de notre série d’hommage à celui qui aura éclairé son sport tant par sa maestria au pied sur un terrain que par sa passion teintée de gouaille en dehors, la rédaction du MagSport a décidé de donner la parole à un de ses « fils spirituel » : Jérôme Montbroussous. Joueurs cadres du SC Graulhet depuis une décennie, ce bigourdan d’origine partageait avec son célèbre mentor cette capacité à s’être fondu comme un poisson dans l’eau à cette ville à l’ADN ovalien si particulier. Disposant des caractéristiques rugbystique bien différentes, Jérôme Montbroussous et Guy Laporte possédaient une connexion humaine forte et prégnante. Ce 3/4 centre de devoir portant le maillot rouge et noir pour sa dernière saison était devenu au fil du temps un véritable ami de l’ex ouvreur du XV de France aux drops aussi mémorables que sa carrière. Et « Monsieur Guy » le lui rendait bien en voyant en lui et en Jules Montels de futurs dirigeants du club voire des héritiers pouvant entretenir la flamme du temple sacré de Noël Pelissou. Un hommage poignant d’un des joueurs du SCG qui va tenter d’exaucer avec ses coéquipiers le rêve du défunt président Laporte, la montée en Nationale 2 et le retour des playoffs dans la terre mégissiers. Quand Jérôme le joueur/pharmacien de graulhet parle de son légendaire président, c’est tout une histoire moderne des rouges et noirs qui se dévoile sous nous yeux avec pudeur mais emplit d’une amitié non feinte dont la passion du ballon ovale en était le dénominateur commun.

Graulhet est tombé sous le choc de la disparition brutale de Guy Laporte. En plus d’un monument du rugby français, c’est vraiment une poutre et une pièce maîtresse du Sporting Club Graulhetois qui s’en est allée ?

Oui, complètement, en plus, quand c’est soudain comme ça, ce sont des choses qui sont très compliquées à gérer et à comprendre. Je pense à sa fille, à toute sa famille, il y a encore sa maman, et son frère. Il y a déjà l’homme qui va me manquer énormément et il y a Guy Laporte à Graulhet, je racontais que, quand on avait signé à Graulhet il y a 12 ans, mon père disait  » mais tu signes dans le club de Guy Laporte « . C’est vrai que Guy Laporte faisait résonner Graulhet et que, quand on parlait de Graulhet, on parlait de Guy Laporte et donc, c’est une grosse, grosse perte pour Graulhet.

Et plus particulièrement pour toi qui avais une grande proximité avec Guy. Tu faisais aussi partie des joueurs qui étaient allés le chercher  » par le manteau  » pour qu’il revienne au club. C’était quasiment un père adoptif pour toi ?

Je crois qu’on se téléphonait au minimum tous les deux jours. On n’était pas tout le temps d’accord sur plein de choses mais je l’adorais car il savait que j’étais passionné par ce sport et par la ville et lui était un passionné du rugby 10 fois plus que moi. Donc, on arrivait à échanger, on mangeait ensemble au moins une fois par semaine pour parler, parler de l’avenir, du rugby, des matchs du week-end. C’est vrai que l’on avait une proximité, on se bataillait souvent pour de petits sujets sur lesquels on n’était pas d’accord mais c’était génial.

C’était aussi plus qu’un président mais quasiment le VRP du club, le représentant de Graulhet auprès des instances ainsi qu’un directeur sportif ?

C’est que certains pouvaient parfois lui reprocher aussi car il voulait tout gérer et tout comprendre. C’est comme quand tu reprends une entreprise, tu veux essayer de tout comprendre, tout maîtriser et partir de A pour arriver à Z et c’est ce qu’il était en train de faire. C’est ce que je dis souvent, à partir du moment où il est arrivé jusqu’à maintenant, il avait vachement évolué sur pleins de sujets. C’est vrai qu’il y avait plein de choses qu’il voulait faire et comprendre et il adorait le côté sportif : il adorait avoir des agents au téléphone, s’occuper de certains joueurs et de certains étrangers qu’il faisait venir et il l’assumait car il s’en occupait beaucoup, c’était un père adoptif pour beaucoup. C’était une figure, vraiment un personnage dont tu dis qu’il n’y en a pas beaucoup dans le rugby d’aujourd’hui.

C’était également un personnage atypique comme on les aime dans le rugby fédéral, avec une gouaille, un humour mais aussi une humanité ?

Quand je suis arrivé à Graulhet, on disait que c’était un grand timide, il avait parfois quelques maladresses qui, quand tu le connais et avec le recul, étaient rigolotes. J’ai eu trois supers présidents à Graulhet mais c’est vrai que lui avait cette faculté d’être passionné. Il était là à tous les entraînements, c’était impressionnant car ça veut dire qu’il ne loupait pas une minute d’entraînement et puis, il était dans les vestiaires avant, pendant, après. C’était plus qu’un président mais il ne voulait vraiment rien louper, non pas parce qu’il voulait surveiller car il était très content des entraîneurs, mais vraiment parce qu’il ne voulait rien louper. Il adorait le terrain, il adorait être dans les vestiaires, il adorait être aux entraînements et aux séances vidéos pour dire son petit mot à la fin. Ca pouvait parfois paraître maladroit mais c’était juste qu’il était heureux d’être là, il était tout simplement heureux d’être là.

Il était aussi un fabuleux orateur, bourré d’anecdotes, qui pouvait faire des récits du rugby comme on les aime ?

Complètement, des anecdotes sur lui, sur son passé, sur l’évolution, sur comment il voit le rugby d’aujourd’hui. Il y en a quelques uns à Graulhet mais lui avait cette faculté, bien qu’il ait joué dans un rugby qui a quand même complètement changé, de réussir à évoluer en même temps que le rugby c’est à dire qu’il parle du rugby de maintenant avec une expérience qui est quand même assez impressionnante.

Le plus beau cadeau que vous pouvez faire à Guy est d’aller en play-off, qui lui étaient chers, pour les ramener à Pélissou et gratter cette Nationale 2, pour remonter Graulhet dans le rugby semi-pro ?

C’est vrai que c’était vraiment son souhait et son premier objectif que de déjà refaire les phases finales. Depuis qu’il a repris le club, c’est vraiment la première année où l’on a scindé cette poule Nationale et cette poule Fédérale, on sent que Graulhet y a quand même plus sa place maintenant. Il a fait un recrutement vraiment fait pour lui, adapté à ce qu’il voulait, les premiers six mois ont quand même été très bons. Il faut finir le travail qu’il a fait en allant chercher des phases finales et après, le reste viendra mais on a tellement envie de faire plein de choses pour lui que la plus importante sera de se concentrer sur les matchs qui restent les uns après les autres. J’espère qu’il aura ce qu’il méritait.

Pour toi, quel est l’héritage Guy Laporte à Graulhet même s’il est difficile de le définir en quelques mots ?

Comme je le disais, c’est déjà une génération, je le vois depuis quelques jours à la pharmacie, ce sont des gens qui se voient aller au stade quand ils avaient 20 ans. C’est ça l’héritage Guy Laporte, je pense que pour beaucoup de Graulhétois, ce sont des souvenirs au stade Noël Pélissou que nous, nous n’avons pas connu. Donc, je pense que c’est déjà une génération de Graulhetois et de Tarnais en général qui se rappellent de ces années-là. Ensuite, c’est vraiment cette passion car moi, ce que je reproche un peu au rugby actuel, c’est un manque de passionnés mais aussi l’attrait financier et le fait de le voir comme un métier. Cette génération-là n’a pas gagné énormément, ils gagnaient un petit peu mais ils ne se levaient pas pour aller à l’entraînement pour ça tandis que maintenant, il est vrai que tout le monde n’a pas la passion dans le rugby mais lui, c’est son héritage, celui de le faire à fond quand tu es passionné.

Pour finir sur une note positive, quelle est la plus belle image que tu garderas de Guy ?

J’en ai plusieurs mais pour moi, c’est quand on buvait le café tous les matins. Il avait le journal et me demandait déjà des rendez-vous pour tout le monde, il avait ce dynamisme dès le matin pour parler rugby. Ce sont ces petits cafés du matin qui vont me manquer.

Propos recueillis par Loïc Colombié
Crédit photo Comité Tarn Rugby

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